lundi 24 septembre 2012

« Natures mortes »

Elle avait un drôle d’air cette pomme. Une allure de pierre grêlée, tombée, momifiée. Son unique feuille, minérale, se figeait dans une teinte de porcelaine. Elle la portait à droite -  un peu comme Adolf aurait porté sa mèche de crétin, saluant bizarrement, goguenarde, dans un garde-à-vous impeccable, claquant des talons sur la table comme un cosaque dans une salle de glaces. La tige ligneuse partait, elle, à gauche - comme la kalach’ d’un ougandais, pointée dans la diagonale du ciel, prête au sale coup.
Une comparse talée, cicatrisée, noircie, en retrait,  comme rescapée d’une  foire à la  machette, mouchetée de tavelures, tachée de mycoses, écoutait, sous la  cruauté du soleil, le Destin aux méchantes oreilles. Une encoignure plissait son flanc comme un baigneur déformé.
Calée à droite, une autre mémère, verte, potelée, les secondait toutes sous une  modeste balafre.
En arrière, tassées contre le pichet jaune, des noix faisaient foule sous leur fard mazouté. Des lunettes renversées ne laissaient pas de doute : la bataille s'était dissipée.

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